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Vesper Chan, ou 陳國義 (Chen Guo Yi) en Chinois, est un des très grands noms du thé et du puerh. Fondateur du célèbre "Best Tea House" à Hong Kong (voir article "Les meilleures tea houses de Hong Kong"), Vesper Chan est reconnu comme un des plus grands spécialistes mondiaux du thé, en particulier des puerh (Pu Er tea) et des wulong, mais aussi comme un des experts les plus renommés en stockage et vieillissement de ces thés. Souvent considéré comme l'inventeur du stockage sec, on attribue notamment à Vesper Chan l'arrivée sur le marché et la popularisation du puerh (Pu Er tea) brut (vert) à Hong Kong dans les années 90, là où on ne consommait alors que des puerh (Pu Er tea) fermentés (par wu dui ou stockage humide hongkongais).

Vesper Chan est, aussi, particulièrement connu des amateurs et des collectionneurs pour une galette célèbre nommée 88 Qing bing, un stock de 7542 produite par Menghai Tea Factory entre 1989 et 1991, et conservée avec grand soin par Vesper Chan. Cette galette, entrée dans l'histoire du thé puerh, est très recherchée par les collectionneurs et amateurs de puerh (Pu Er tea) anciens et se vendent régulièrement aux enchères pour quelques milliers d'euros pièce.

J'ai eu la grande chance de m'entretenir longuement avec Vesper Chan à Hong Kong l'hiver dernier, et c'est un plaisir de vous livrer, à travers le présent article, l'essentiel de cet entretien, qui retrace avec grande sensibilité et humilité, près de 30 ans de la vie et de l'histoire de ce grand "maître" hongkongais du thé chinois.

Un grand merci encore à Vesper Chan de nous avoir consacré autant de temps et d'énergie.

Vesper Chan par Vesper Chan, l'histoire d'un grand homme du thé chinois

    Olivier Schneider: Pouvez-vous nous parler de votre parcours, de vos début dans le thé, comment en êtes-vous arrivé là?

    Je vais vous raconter simplement l'histoire de ma vie. Avant que je ne sois dans le commerce du thé, il y a 23 ans de cela, j'ai beaucoup lu sur le thé, puis je suis allé à Taiwan et dans les montagnes à thé chinoises, pour comprendre comment se faisait le thé, comment était cultivé le thé. Et la première fois que je me suis rendu dans les montagnes à thé, en 1996, ce fut pour moi une merveilleuse expérience, parce que tout étais frais, comme l'arôme naturel qui provient des fleurs ... et cela vous fait vous sentir ... vraiment différent que dans une ville (rires). Donc, c'est pourquoi je suis tombé amoureux du thé. Ca, c'était le tout début.

    Mais même avant cela, c'est à dire il y a à peu près 30 ans, je travaillais dans l'industrie pétrochimique, ce qui m'a permis de gagner beaucoup d'argent. J'ai travaillé dans ce domaine pendant 15 ans, puis j'ai commencé à être un peu ennuyé et j'ai eu envie de visiter le monde. J'ai alors décidé de rendre visite à mes clients et fournisseurs de l'industrie de la pétrochimie. Ils étaient aux Etats-Unis, en Allemagne, en Angleterre, aux Pays Bas, en Belgique, en France. Des pays bien connus pour leur avance dans la connaissance du domaine de la pétrochimie. Mais, quand je suis arrivé dans ces pays, j'ai à chaque fois trouvé la même chose: une très lourde pollution. Avant tout, la mer, la mer à l'approche des villes était noire! J'étais terrifié. Le pire fut la mer au Japon, et aux Pays Bas. Il y'a quelque chose de très étrange: d'un coté les villes sont tellement développées, tout est tellement pratique et moderne, mais quand vous y arrivez par la mer, sur une mer de couleur noire, waaaaaa, cela vous donne une image radicalement différente. Et c'est alors que j'ai compris, pourquoi dans le monde, il y avait des gens qui se battaient pour protéger l'environnement. Pourquoi ils sont autant révoltés par cette pétro-pollution des villes et pourquoi à leurs yeux c'est cela qui ruine toute la planète. A ce moment là, j'ai compris leur point de vue.

    Une fois revenu à Hong Kong, je me sentais tellement coupable, et j'ai commencé à penser: que dois-je faire? Puisque mon business ruine la planète, et rend la pollution pire encore. Alors je me suis dit que je devais suivre la bonne voie. Chacun doit faire un pas, même s’il semble petit, pour protéger notre planète. C'est un besoin. C'est alors que j'ai entamé un profond questionnement sur ce que je devrais faire après le pétrole. J'ai lu tellement de livres pour trouver une réponse que cette recherche a commencé à devenir un véritable hobby.

    Finalement, j'ai trouvé que le thé était quelque chose de merveilleux! Tout d'abord, parce que le thé ne va pas polluer les villes, mais le thé permet aussi aux gens d'être en meilleure santé, sans avoir besoin de détruire quoi que ce soit ou de tuer qui que ce soit. Parce que, si par exemple, tu veux devenir un bon policier, tu devras tuer des gens (rires). Je me suis donc dit que le thé pourrait devenir un merveilleux passe-temps pour ma retraite. C'était à peu près .... il y a 28 ans, les 23 ans de mon commerce, et les 5 premières années que j'ai passé à étudier le thé.

    J'ai donc commencé par passer environ 5 ans à faire des recherches sur le thé, à apprendre comment comprendre le thé chinois, comment comprendre le pays, je veux dire la terre où sont cultivés ces thés. Puis j'ai passé les deux dernières années à étudier comment infuser le thé. Après avoir passé ces deux dernières années sur l'art de préparer le thé, tout était devenu clair, et alors j'ai ouvert un petit magasin de thé. C'est la naissance du "Best Tea House" (rires).

    Receuil de textes de Vesper Chan, publié par une radio de Hong KongReceuil de textes de Vesper Chan, publié par une radio de Hong KongThe Best Tea House aujourd'hui
    • 1.Receuil de textes de Vesper Chan, publié par une radio de Hong Kong
    • 3.The Best Tea House aujourd'hui

    Après avoir ouvert mon magasin de thé, j'ai alors pensé que je devais écrire un livre, pour apprendre aux gens à comprendre le thé, comment le préparer, etc. Mais je ne me sentais pas prêt pour cela, alors j'ai prévu de laisser passer 3 ans avant d'écrire ce livre. Et après ces 3 années passées dans le milieu du thé, j'ai pris conscience que j'étais vraiment un débutant, qu'il y avait tellement de choses qui continuaient à m'échapper, que je ne comprenais pas ... et j'ai donc décidé de ne pas commencer mon livre (rires). Puis je me suis dit: Ok, Vesper, je te donne deux années de plus, cela fera au total 5 ans .... Deux années se sont donc passées, puis j'ai compris que si le thé était une maison j'avais à peine mis le premier pied dedans... et donc j'ai à nouveau décidé de ne pas écrire ce livre. Alors, je me suis donné encore 5 ans de plus, ce qui fera 10 ans. Et à l'issue de ces 10 ans, j'avais enfin le courage d'écrire ce livre, mais ce fut le moment où mon business explosait, cela marchait trop bien. J'ai ouvert de nouvelles succursales ici et là, une ou deux chaque année. Donc finalement je n'avais plus le temps d'écrire ce livre.

    A cette époque, une station de radio m'a demandé d’intervenir sur leur antenne à propos du thé. Ils m'ont proposé de faire une série de 26 émissions sur les différents types de thé. Donc, pour chaque thé, j'ai fait quelque chose de vraiment simple, pour les débutants. Parce que nombre des auditeurs de la radio ne comprenait pas le thé. C'est pourquoi, j'ai fait quelque chose de très simple, d'utile. Puis la radio a collecté toutes les informations pour en faire ce petit livre (rires). Finalement j'avais mon livre. J'y ai passé en revue le thé vert, le thé âgé, le thé aromatisé, les thé puerh (Pu Er tea) et wulong, parce que la série couvrait majoritairement les six grands types de la Chine Continentale ainsi que celui de Taiwan: le wulong. Parmi les thés spéciaux abordés dans ce livre il y a aussi le wulong âgé, et, moins courant encore, nous avons un autre magnifique thé... je vais vous montrer.

    Thés anciens et écorces d'oranges agéesThés anciens et écorces d'oranges agéesThés anciens et écorces d'oranges agées
    • 1.Thés anciens et écorces d'oranges agées

    Ce sont des écorces d'oranges âgées. Ce ne sont pas des oranges ordinaires, mais une variété particulière d'oranges dont l’écorce est très fine. Ces oranges là vous devez les stocker au moins 5 à 8 ans avant d'en utiliser l'écorce. Alors elles vous donneront un arôme magnifique. Sentez-les... Par ailleurs, elles renferment différents éléments bénéfiques utilisés dans la médecine chinoise. Lorsque les gens atteignent une cinquantaine d'année, leur système respiratoire n'est plus pas aussi performant que lorsqu'ils étaient jeunes. Or, lorsque vous associez ces écorces d'orange au thé, elles vont rendre votre gorge très propre, accroître l'efficacité et la fluidité de tout votre système respiratoire. Ce thé, je vais vous le dire, a été stocké avec ce type d’écorces d'oranges âgées depuis 1995. C'est un de mes savoirs particuliers, je l’évoque aussi dans le livre, et c'est un cadeau pour vous.

    Laissez-moi infuser ce thé, pour vous le faire goûter. Comme vous voyez, ce type d'oranges âgées a été mis en contact avec le thé. On dispose une couche de feuilles de thé d’environ 2 pouces d'épaisseur, puis une couche d’écorces d'orange , puis 2 pouces de thé puis une couche d’écorces d'oranges, deux pouces puis une couche, etc. On peut faire cela avec du wulong et du puerh. Mais avec cette variété d’écorces d'oranges, même si elles sont âgées de 10 ans, elles ne peuvent être assemblées avec de jeunes puerh (Pu Er tea) ou de jeunes wulong. Car, comment dire, le puerh (Pu Er tea) vert est assez ... Épicé ... et donc, il faut d'abord attendre que cet arôme de vert s'évapore. Vous avez besoin de ce type de savoir, sinon vous ne pouvez pas faire ce genre de thé. C'est la même chose pour le wulong, vous ne pouvez pas utiliser des wulong aux arômes frais et intenses, sinon ils tourneraient mal, se détérioreraient. Il faut d'abord les mettre sur le feu, laisser tout le vert s'évaporer, et seulement après, vous pourrez les mêler aux écorces d'oranges, puis les laisser 23, 30, 50 ans. Plus le temps est long plus le résultat sera magnifique et appréciable. Donc, pour ce type de thé, il faut au moins laisser le thé et les écorces ensemble durant 10 ans, mais plus on les laisse, mieux c'est (rires).

    Olivier Schneider: Un tel thé, si finement aromatisé aux écorces d’oranges âgées, ça n’est vraiment pas courant. Comment avez vous découvert cela ?

    Oui. Bonne question. Après avoir commencé mon commerce, pendant la deuxième année, j'avais un client qui était un médecin chinois. Il aimait beaucoup le thé puerh, surtout le puerh (Pu Er tea) âgé. Un jour, il m'a demandé: Mr. Chan, pourquoi est-ce que vous ne mettriez pas quelques écorces d'oranges anciennes dans votre puerh (Pu Er tea) âgé? Alors je lui ai demandé pourquoi, car je n'en avais jamais entendu parler. Il m'a alors parlé de ce qu'il avait appris de son père, qui était un médecin chinois très réputé. Notamment, que ces écorces âgées étaient très bonnes pour centraliser l'effet de la médecine chinoise. De plus elles permettaient de protéger l'estomac. Car, le thé peut empirer les effets d’un estomac légèrement en mauvais état. En ce sens, associer ces écorces avec du puerh (Pu Er tea) âgé permet de protéger l'estomac et donc la santé de celui qui le boit.

    Donc, lorsqu'il m'a dit cela, j'ai essayé d'assembler du thé puerh (Pu Er tea) à des écorces d'oranges âgées de 10 ans, et j'ai attendu environ 3 ans. A ce moment là, je n'en avais pas parlé à mes étudiants et mes clients. Un jour, j'ai infusé différents thés que j'ai donné à goûter à ceux qui étaient là. J'ai découvert que les tasses qui furent finies le plus vite était celles contenant le thé qui avait été vieilli avec les écorces d'oranges (rires). Toutes finies! Bien sûr, ils ne savaient pas ce que c'était. Donc, je me suis dit que c'était probablement une bonne chose pour moi de commencer à faire ce type de thé, vraiment merveilleux pour les connaisseurs.

    Ce thé-ci est un tie guan yin profondément fermenté, qui a vieilli avec cette variété d'écorces d'oranges âgées. Nombre de mes étudiants veulent apprendre à confectionner ce thé ; ou bien, ils en achètent pour le faire vieillir. J'en connais deux ou trois qui ont un stock de ces jarres chez eux, parfois plus de 30 jarres, et c'est très clairvoyant, parce que, plus tard, il sera encore meilleur.

    Il y a deux domaines dans le thé où je suis pointu: le thé puerh (Pu Er tea) et le thé wulong. Je vais d'abord vous dire comment je comprend le wulong, d'accord?

    Certaines personnes, peut-être pas assez éduquées, vous diront probablement simplement qu'il y a trois types de fermentation au wulong: légère, moyenne et forte. Donc, la fermentation légère procure un arôme très naturel, vert. Les fermentations plus fortes nécessitent, quant à elles, plus de temps, et permettent au thé de vieillir. Or pour cela, il faut torréfier les feuilles plus longtemps. Normalement, pour les thés que l'on trouve sur le marché, on laisse les feuilles sur le feu pendant deux heures. On utilisera alors un feu intense, et cela rend les feuilles très sombres.

    Cependant ce ne sont pas de vrais bons thés, ce sont des produits pour le marché. Les vrais bon thés nécessitent une fermentation profonde, à peu près 30%, là où une fermentation légère se situe entre 10% et 15%. Donc, pour ce type de fermentation profonde, il est nécessaire de torréfier le thé entre 20 et 30 heures, suivies d'un affinage d'environ trois mois, et seulement après, vous pouvez le mettre sur le marché. Ce sont les étapes normales pour faire un wulong profondément fermenté de qualité. Mais aujourd'hui, il n'y a pas beaucoup de gens qui ont l'envie de faire ce type de thé, parce que cela demande du temps, de l'énergie, de la main d'oeuvre, et alors, vous devez monter les prix. Mais le consommateur ne comprend pas pourquoi le prix est si élevé. Donc, ce n'est pas facile. C'est pourquoi, nous ne vendons que ce type de thé aux connaisseurs (rires). On forme un groupe de connaisseurs pour ce genre de wulong. Une partie de ce type d'amateurs éclairés vient de Taiwan, l'autre vient de Chine, en priorité de Hong Kong.

    Ce type de wulong de qualité peut être stocké pendant de nombreuses années. Peu de gens le comprennent, ils pensent que seulement le puerh (Pu Er tea) peut vieillir, mais le wulong est un autre merveilleux thé, qui permet au connaisseur de savourer l'émergence d'arômes magnifiques, dans la bouche et l'esprit. Tout le monde sait que le wulong vient de Taiwan, des montagnes Wu Yi, de Anxi et Guangong, Dan Cong. Mais chacune de ces zones géographiques produit des goûts différents. Les wulong de Dan Cong ont des arômes tellement actifs, fruités et doux, ceux des montagnes Wu Yi sont tellement lourds, forts, tandis que ceux de Taiwan sont très soyeux, frais. Donc si vous savez comment apprécier ces différents types de wulong... quelle vie merveilleuse!

    Voilà, en quelques mots ma vision du wulong. Je suis ensuite passionné et reconnu concernant le thé puerh. C'est surtout à cause d'un thé très fameux et connu appelé 88 qing (ba ba qing). Parce que ce thé est arrivé dans mon magasin à peu près... 5 ans après que j'ai commencé mon business. Le vendeur était le représentant de Menghai Tea Factory. Il m’a apporté cette galette de puerh (Pu Er tea) , et lorsque j'ai ouvert l'emballage et que j'ai regardé la galette ... j'ai été effrayé! Pourquoi le puerh (Pu Er tea) avait it une couleur verte? Est-ce que c'etait vraiment du puerh? Je voulais savoir (le puerh (Pu Er tea) n'était alors consommé à Hong Kong que sous la forme fermentée ou issu de stockage humide, donc sombre - ndlr.). Et là il me dit: oui, c'est du vrai thé puerh, mais il n’est généralement pas vendu sur le marché. Ils en avaient beaucoup en stock à Menghai Tea Factory, alors je lui demande: pourquoi personne n'a acheté ce thé avant? Je n'ai jamais goûté ce type de thé puerh! Il m'a expliqué qu'il s'agissait d'un thé non fermenté (brut).

    Après l'avoir goûté, j'ai découvert que ce thé avait un arôme vraiment naturel, l'arôme de la montagne. Puis j'ai infusé ce thé 7, 8, 9 fois ... sans que le goût du thé ne se perde. A Hong Kong on consomme généralement du puerh (Pu Er tea) artificiellement fermenté (shu cha). Quand vous arrivez après quatre ou cinq infusions, cela devient liquide, ce n'est plus vraiment du thé. Mais là, jusqu'à dix infusions, j'ai vraiment trouvé ça incroyable. Puis, j'ai demandé le prix. Le prix était alors de 7,8 RMB () par galette. A cette époque, lorsque j'importais 500g de long jing cela coûtait déjà 380 RMB (). Mais ce puerh (Pu Er tea) vert, vous pouvez l'infuser deux ou trois fois plus qu'un long jing. Pourquoi est-il si peu cher? Je ne croyais vraiment pas ce prix!

    Il me dit: Mr Chan, si vous voulez en acheter, on en a 90 tonnes. Je lui demande quelle volume représentait une tonne? (large rires). Je n’en avais aucune idée! Et donc, 30 tonnes ça faisait à peu près 2 fois la taille de mon petit magasin. Je me suis dit woooooow, combien de temps me faudra t’il pour écouler la vente de tout ce thé? Mais il était tellement peu cher, je ne voulais pas abandonner. Donc, je lui ai demandé: peut on faire un arrangement, j'ai besoin que vous livriez le thé en 3 fois, sur trois ans, comme ça j'aurai trois ans pour essayer d'éduquer mes clients, essayer de trouver comment vendre un tel thé. Et il a accepté de livrer sur trois ans. Ok, mais ensuite j'ai commencé à être vraiment confus et effrayé: comment faire avec tout ce thé? J'ai stocké ce thé pendant 5 ans, je n'avais pas d'entrepôt , donc j'ai loué un espace dans un entrepôt public. Un jour, mon comptable m'a parlé du coût du stockage de ce thé! Cela s'élevait à plus de 300 000 HKD. Vous ne comprenez jamais, parce qu’ ils vous parlent de 5000 HKD par mois, seulement 5000 HKD, ça ne semble rien. Mais le temps passe et vous ne vous rendez pas compte que la note s'alourdit et ce que cela coûte au total, finalement, plus de 300 000 HKD pour ce thé! J'étais effrayé (large rires)! Avec tout ce que ce thé m'avait coûté finalement, j'avais besoin de doubler le prix, puis vite de le doubler encore! Ouuuuuuuulalala (rires). Mais la période la plus dure fut ensuite, durant l'épidémie de SARS.

    Olivier Schneider: Quand vous avez acheté ce stock de puerh (Pu Er tea) vert, en 1993, personne n'était habitué à boire du puerh (Pu Er tea) vert à Hong Kong. Quelle fut la réaction des gens? Cela a du être une sorte de choc pour les clients, non?

    Oui, c'est vrai. Alors que pouvais-je faire? J'ai commencé par la chose transmettre aux jeunes. Parce que les consommateurs plus âgés, ne croyaient pas que c'était du thé puerh! Ils ont l'habitude de boire du puerh (Pu Er tea) très sombre (fermenté ou issu de stockage humide - ndlr.). On a rit sur mon dos, on m'a traité de stupide: pourquoi donc est-ce que je vendais du puerh (Pu Er tea) vert? Beaucoup disaient que personne n'achèterait ce thé! (rires). Oui, à ce moment là, c'était comme ça.

    J'ai importé ce thé en 1993, avec des livraison annuelles régulières entre 1993 et 1995, et en 1995 , j'avais toute la livraison. Ensuite, j'ai dû éduquer mes clients, les jeunes et les étudiants, à boire ce thé. J'ai dû leur apprendre à infuser ce thé, parce que, ici, généralement pour le puerh (Pu Er tea) (fermenté - ndrl.), on lavait le thé, une fois, et puis on commençait la deuxième infusion à au moins 5 minutes. Donc j'ai découvert que pour ce thé (non fermenté - ndrl.), il fallait commencer à infuser 5 secondes seulement. Ce fut vraiment le premier concept, comment infuser le puerh, pas seulement à Hong Kong, mais dans toute la Chine: utiliser une technique spéciale pour infuser le thé puerh, en seulement quelques secondes. Les étudiants eux, le savent, mais peu de gens comprennent cela.

    La première fois que, dans un ouvrage, j'ai écrit pour enseigner aux gens comment infuser le thé en quelques secondes seulement, et que ce message est arrivé sur le marché, quelques personnes du milieu du thé me prirent pour un fou: comment le thé peut-il donner son arôme en seulement quelques secondes? Maintenant, vous pouvez voir ce que ça donne, en même pas 5 secondes (il me tend une tasse de thé de 2008 (Feng Qing)).

    Puis 1997 ce fut le moment à Hong Kong où on apprend que l'île allait redevenir chinoise. Donc, de nombreux chinois de Hong Kong ont immigré vers d'autres pays: la Nouvelle-Zélande, l'Angleterre, les Etats-Unis et le Canada. Avant d'immigrer là bas, beaucoup de gens vinrent pour apprendre comment infuser le thé chinois. Donc ma tea house était pleine tous les soirs (pour les cours que donne Vesper Chan quotidiennement - ndrl.)! Il y avait plus de 40 personnes, on n’avait même pas assez de chaises pour que chacun puisse étudier et ils restaient debout (rires). Oui! c'était très actif avant 1997! Ils aimaient aussi acheter quelques bon thés, pour les emmener avec eux dans ces nouveaux pays. Pour avoir quelque chose à se rappeler.

    Donc à ce moment, nombre de mes étudiants achetait beaucoup de 88 qing et les ont emmenées avec eux dans ces pays. Mais après 5 ans, en 2003 il ya eu l'épidémie de SARS. Ce fut la pire période, ça m'a presque ruiné. Presque ruiné, parce qu’en un mois, le premier mois après qu'on commence à parler de SARS, plus personne ne voulait acheter quoi que ce soit. Et ce fut comme ça pendant un an! Seules, une ou deux personnes, entraient dans ma boutique pour acheter du thé. Alors, j'ai couru dans la zone touristique, où j'avais vu quelques boutiques vides, dans des zones très passantes, et j'ai dû payer 500 000 HKD par an pour les louer. Avant la fin du SARS en 2004 j'ai dû hypothéquer ma maison, mes deux maisons, pour pouvoir payer le salaire de mes employés. Et moi-même, pendant 6 mois je n'ai pas pu me payer. Et avec ça, je devais continuer à payer mes dettes, 3 000 000 HKD... c'est pourquoi j'étais presque ruiné et je me suis juste demandé: Pourquoi? Je suis tellement sincère sur le thé de qualité (rires) et je travaille tellement! Même après les heures d'ouverture, à 7 heures du soir, je commence mes cours pour mes étudiants, jusqu'à 10 heures, parfois même jusqu'à 11 heures, parce que je suis si heureux d'enseigner. Cela pendant presque 10 ans, et maintenant je me retrouve vraiment sérieusement endetté, sans argent ni perspectives ... Donc, c'était vraiment devenu un business mort (fou rires)!

    Mais après 2004, un jour, je reçois un coup de téléphone et quelqu’un me demande: Mr Chan, je sais que vous avez un très bon thé puerh, que vous nommez 88 qing. Pouvez-vous m'en vendre? Alors j'ai demandé combien il en voulait? Et il me répond: combien en avez-vous? (large rire). Waoooo. Je lui ai dit le prix, seulement 150 HKD par galette, mais à ce moment là en 2005, les prix avaient beaucoup monté et cela valait déjà 580 HKD par galette. Mais je voulais en vendre beaucoup, rapidement, récolter beaucoup d'argent pour payer mes dettes. Donc, j'ai dit 150 HKD par galette seulement. Finalement, il a acheté environ 50 galettes. Mais la semaine suivante, je reçois un nouveau coup de téléphone, d’une femme: Mr. Chan, je sais que vous avez du 88 qing, je veux en acheter! Et alors je les ai vendues à 200 HKD. Et après, une troisième personne m'a aussi appelée je les ai à nouveau vendues à 200 HKD la galette. Mais peu après, le premier acheteur m'a rappelé pour en racheter et là je suis passé à 250 HKD, puis il a arrêté d'acheter. Ensuite, un taiwanais à commencé à m'en acheter. Donc, en un mois, j'ai vendu plus de 3 000 0000 HKD de 88 qing, 3 millions! Ce qui était juste assez pour payer toutes mes dettes! Waaaahou, j'étais tellement heureux! Ce fut le mois le plus heureux de ma vie! Superbe moment...

    Le 88 qing m'a vraiment apporté une expérience profonde concernant le puerh. Pourquoi? Je crois que j'ai utilisé mon coeur pour stocker ce thé, dans un stockage sec. Je n'ai pas suivi ceux qui aspergent leur thé d'eau pour les faire vieillir plus rapidement. Et donc, dans ce moment des plus difficiles, le 88 qing a sauvé ma vie! C'est la vérité! Depuis cette expérience, je suis de plus en plus mon feeling pour stocker le puerh (Pu Er tea) de la bonne manière.

    Je vais vous faire goûter un thé rare. Ce thé, je vais vous le dire, je l'ai stocké depuis 1996 ... mon premier thé. Je pense que vous êtes très chanceux. Cela a prit tellement de temps à ce thé pour devenir ce qu'il est maintenant, et vous dès le premier jour, vous pouvez le goûter (rires).

    Thé de 1996 stocké par Vesper Chan dans son stock personnelThé de 1996 stocké par Vesper Chan dans son stock personnelThé de 1996 stocké par Vesper Chan dans son stock personnelThé de 1996 stocké par Vesper Chan dans son stock personnelThé de 1996 stocké par Vesper Chan dans son stock personnel
    • 1.Thé de 1996 stocké par Vesper Chan dans son stock personnel

    En Chine, on insiste sur le fait que l'eau doit être totalement bouillante pour infuser le puerh. Je ne suis pas tout à fait d'accord, comme vous pouvez le voir, je laisse un peu la température redescendre avant d'infuser ce thé. Sentez l'émotion qui se dégage du résultat. Pas mauvais? Une eau trop chaude aurait détruit l'émotion du thé, en aurait fait quelque chose de très dur. Les gens qui infusent le thé ne comprennent souvent pas la véritable fonction de la température.

    Pour moi, ce thé, quand je ferme les yeux, c'est une image complète de la montagne qui se dessine dans mon esprit, les fermiers qui vivent dans des maisons de bois au coeur d'une zone isolée.

    Dégustation de thé avec Vesper ChanDégustation de thé avec Vesper ChanDégustation de thé avec Vesper Chan
    • 1.Dégustation de thé avec Vesper Chan

    Aussi pour infuser des thés âgés, vous devez utiliser une bonne théière, une théière âgée. La théière que je suis en train d'utiliser pour infuser ce thé a plus de 200 ans, et date d'avant la révolution chinoise. C'est de l'antique terre violette (de Yixing). Cela fait toute la différence. Le principal changement est la forme de l'eau. La forme de l'eau est plus douce et ronde. D'autres théières produiront une forme d'eau plus solide, plus sèche.

    Olivier Schneider: Outre le vieillissement du puerh, comme celui que nous buvons, domaine dans lequel vous êtes particulièrement reconnu, vous possédez aussi une magnifique collection de wulong âgés. Pouvez vous nous parler des différences entre vieillissement du puerh (Pu Er tea) et vieillissement du wulong?

    En effet, c'est la même chose, mais c'est aussi totalement différent. Parce que pour le puerh, le thé doit rester en contact avec l'air, c'est très important. Pour le wulong au contraire, le thé doit être totalement fermé. Ce sont des concepts totalement différents.

    Olivier Schneider: Vous êtes réputé pour être en quelque sorte, l'inventeur du stockage sec (du puerh) à Hong Kong. Pouvez vous nous parler de cela, du stockage du 88 qing, pourquoi et comment cela s'est passé?

    Donc pour le stockage sec ... pourquoi est ce que j'ai mis le 88 qing dans un stockage sec? Parce que au tout début, avant que je ne commence ce business, je voulais en apprendre plus à propos des thés puerh (Pu Er tea) et wulong. Comment torréfie-t-on le wulong? Comment stockent-on le puerh? Pourquoi le puerh (Pu Er tea) a-t’il une couleur aussi sombre? Comment est-ce qu'il est produit? Quel est l'âge réel du puerh (Pu Er tea) sombre? Etc ... Donc, j'ai rendu visite à ceux qui produisaient du thé puerh (Pu Er tea) à Hong Kong. A Hong Kong, ce ne sont pas des paysans, ils ne cultivent pas d'arbres, ne cueillent pas les feuilles; ce qu'il font, c'est juste faire fermenter artificiellement le thé puerh. Donc j'ai visité trois de ces stockages "traditionnels" hongkongais.

    Dans le premier, tenu par un ancien, le thé puerh (Pu Er tea) était mis dans un bâtiment en brique. Le bâtiment était ouvert sur l'extérieur et toute la lumière du soleil le traversait, commençant à l'est pour descendre sur l'ouest. Le bâtiment était plein à craquer de piles de puerh. C'était des gens bien, parce que le thé qui sortait de ce stockage n'était pas totalement noir, mais juste légèrement sombre. J'ai remarqué, en visitant le bâtiment, que la surface des murs de brique était intégralement humide, mais ils ne mettaient pas d'eau dans le thé, ils mettait l'eau à l'extérieur du bâtiment, sur l'ensemble de celui-ci. C'est un des différents procédés de fermentation que j'ai vu.

    Un des deux autres stocks que j'ai visité, appartenait à deux anciens. Le bâtiment était fermé par des portes plastifiées totalement étanches: ils l'ont ouvert pour moi, il faisait entièrement noir à l'intérieur. Quand ils ont ouvert les portes, une odeur très forte et vraiment répugnante est immédiatement venu m'agresser. J'ai avancé ma tête pour voir puis waaaaaaaaaaaaaaa, oh mon dieu, c'était tellement répugnant! Ca m'a vraiment questionné. Pourquoi le thé puerh (Pu Er tea) doit-il être stocké dans ces conditions? Je n’ai même pas eu envie d'essayer ce thé ... parce que ... c'était comme pénétrer dans les égouts de la ville.

    Le stockage suivant était localisé à côté d'une décharge, une sorte de centre de traitement des ordures. Dans cette décharge, on saupoudre tout d'une poudre blanche pour éviter le développement des germes. Ca produisait une odeur très intense et désagréable. Je me suis à nouveau trouvé mal. Comment ont ils pu choisir une telle localisation pour leur stockage? Je ne comprend vraiment pas pourquoi.

    J'en ai vu un autre, tenu par un jeune. Il utilisait des barriques comme les barriques de pétrole, peut-être 5 barriques pleines d'eau, et des douchettes. Le puerh (Pu Er tea) était étendu comme ça, une pile à coté de l'autre. De chaque douche à intervalle régulier, pssshit, et pssshit, ils pulvérisent de l'eau (larges rires). C'est le dernier stockage hongkongais que j'ai vu. Peut être celui-ci est-il meilleur parce qu’au moins il ne s’en dégageait pas d'arômes répugnants (rire).

    Mais tous avaient quelque chose d'artificiel. J'ai goûté les thés qui en sortaient: on n’y trouvait aucun arôme frais, aucun. C'est pourquoi j'ai adoré le 88 qing dès la première fois que je l'ai bu. Quelque chose de tellement naturel, comme la montagne, l'arôme du vert... Merveilleux! A ce moment j'étais fort, je nageais en hiver, je grimpais dans les montagnes, je plongeais dans la mer, je pêchais et goûtais les poissons frais pour voir le goût qu'ils avaient (rires). Jétais très sensible à la nature. C'est pourquoi, quand j'ai collectionné le 88 qing, qui n'était que des 7542, je me suis rendu compte que je n'aimais vraiment pas la manière dont ces gens stockaient le puerh, et j'ai mis ce thé dans un entrepôt public.

    Une chose aussi, à ce moment, c'était avant l'épidémie de SARS, quelques années avant. Je ne m'inquiétais pas du tout des questions financières. J'avais amassé beaucoup d'argent avec le pétrole et je n'avais pas besoin de vendre rapidement ce thé. C'est aussi une des raison du pourquoi: j'avais assez d'argent pour vivre, et pour faire ce qui me semblait bien. Je suis tellement sincère sur la qualité et l'arôme, je ne voulais pas ruiner le 88 qing, donc je l'ai mis dans un stockage propre. A ce moment, je n'avais d'ailleurs aucune idée ou volonté de voir ce que ce thé allait donner dans 10 ou 20 ans, je l'ai juste mis dans un entrepôt sec et propre, pour le stocker. Simplement.

    Olivier Schneider: Quand avez-vous re-goûté le 88 qing pour la première fois après l'avoir stocké?

    Environ 5 ans après. Il était très brut, très puissant. Mais le goût n'avait pas énormément changé, juste, le vert était plus sombre. C'est pourquoi j'ai écrit un poème sur mon expérience du 88 qing, c'est dans ce livre. C’est devenu un poème célèbre.

    Olivier Schneider: Pouvez-vous nous parler de ce nom: "88 qing", pourquoi avoir appelé ce thé, qui était une 7542 de Menghai Tea Factory, "88 qing"?

    Pourquoi j'ai donné ce nom à ce thé, 88 qing? Parce que le responsable des ventes m'a dit que ce thé avait été stocké à Menghai Tea Factory pendant déjà quelques années. Personne ne l'achetait parce qu'il était vert. Alors, après avoir acheté ce thé j'ai pensé: chaque magasin a Hong Kong ne vend qu'une seule "marque" de puerh (Pu Er tea) "Qi Tse Beeng". Toutes ces galettes se ressemblent, quelque soit l'usine dont ils proviennent. Menghai, Xiaguan, à la fin, ce sont toutes les mêmes. Alors je me suis dit que je ne pouvais pas faire comme eux (rires). Je devais mettre un nom sur cette galette unique (de par son stockage -ndlr). Une autre chose aussi, j'ai créé mon entreprise en 1988, et j'ai considéré ce que l'on m'avait dit à Menghai Tea Factory: que ces galettes avaient déjà quelques années en 1993. Donc, en remontant de quelques années, cela pouvait faire 1988. Et j'ai ainsi choisi 88 en mémoire de l'année d'ouverture de ma boutique de thé. C'est pourquoi j'ai appelé cette galette "88 qing" ("qing" signifiant pour sa part "vert" dans le sens de "brut" -ndlr).

    Deuxièmement, si vous prononcez "88" en cantonnais ("baba"), cela signifie que vous serez une personne prospère. C'est vraiment un bonne signification! Ba ba, le premier "ba" signifie que tu seras un homme riche, le second "ba" signifie... que tu seras encore plus riche (éclat de rire). Merveilleuse prévision!

    Quand au 7542 de Menghai Tea Factory l'idée vient de 1975, parce que après les Marques Rouges ce fut la première fois qu'ils assemblairent des thés de différentes natures ou provenant de différentes montagnes. Et il donnèrent à ce thé la référence 7572. Le premier 75 pour 1975, l'année de la conception de ce thé. Puis vient le 4 qui se réfère au grade du thé, et enfin le 2 pour signifier l'usine dont provient cette galette: "Menghai Tea Factory". Et a ce moment, ce thé était vraiment bon, malgré le fait qu'il provenait de tai di (arbustes de culture - ndlr.). L'environnement était meilleur en ce temps, pas de pollution, pas d'engrais chimiques pour rendre les arbres plus verts, plus grands (faits largement contestés et contestables - ndlr). En ce temps, dans les montagnes, le thé poussait de manière naturelle. Et on pouvait faire de la très grande qualité avec du tai di. Car pour trouver des tai di de grande qualité vous devez trouver de hautes montagnes, parfois on appelle cela le thé écologique (Shen Tai Cha), c'est nettement meilleur (que les tai di de basse altitude).

    La deuxième partie de l'histoire (du 88 qing) a commencé il y a environ 2 ans. La valeur d'une galette de ce thé est arrivée à 15 000 HKD. Aujourd'hui, c'est plus de 20 000 HKD la galette. Mais déjà il y'a deux ans, j'avais découvert que mon stock était épuisé! Plus de 88 qing. Qu'est ce que je dois faire maintenant? Alors j'ai commencé à travailler à la continuation du 88 qing, mais avec les arbres anciens. La qualité sera ainsi meilleure encore que le 88 qing. Parce que le 88 qing, c'était Menghai Tea Factory, c'était du tai di, oui. Mais cette fois, parce que maintenant on a une connaissance complète du thé puerh, on se doit de trouver une qualité extraordinaire, bien meilleure encore que le 88 qing.

    C'est pourquoi je suis allé vers cet arbre de 3200 ans, avez-vous entendu parler de cet arbre? (célèbre arbre à thé monumental situé à Fengqing, Lincang, reconnu comme étant le théier le plus ancien de Chine). Je suis allé voir cet arbre en 2002, et j'ai eu le droit de vendre le thé de cet arbre pendant 5 ans. J'avais ce droit en main, d’exploiter le "roi du thé" comme on l'appelle, le vrai, 3200 ans d'âge. Parce que à ce moment là, peu de gens comprenaient ce thé. Donc j'ai vu cet arbre et j'ai parlé avec celui qui en était responsable. Tout d'abord, il est venu me voir à Hong Kong et m'a offert une galette produite à partir des feuilles de cet arbre. A ce moment, je n'ai pas tant porté attention à cette galette. Mais l'année suivante, lorsque j'ai ouvert l'emballage de la galette ... la couleur avait changé! Ce n'était plus le vert d'une feuille fraîche, mais un vert profond et sombre. J'avais l'expérience du 88 qing, qui aurait eut besoin d'au moins 5 ans pour atteindre cette couleur. Cela m'a vraiment surpris. Alors j'en ai infusé quelques feuilles, et j'ai trouvé le thé merveilleux. Donc, j'ai interrogé la personne qui m'avait donné ce thé pour en savoir plus. C'est alors que j'ai appris que ce thé venait du seul arbre (à thé) en Chine à avoir cet âge. Et alors, j'ai demandé à venir voir cet arbre. On était donc déjà en relation avant que j'ai vu l'arbre, il était venu me voir à Hong Kong, et m'avait offert ce thé.

    J'étais tellement intéressé par cet arbre, que j'ai demandé s’il était possible d'en acheter le thé. Il m'a été répondu que oui. Alors j’ai dit que je ne voulais pas juste acheter quelques galettes, mais toute la production de l'arbre. Pouvez vous me donner le droit (exclusif) d'exploiter l'arbre pour 10 ans? Le responsable m'a répondu que oui, mais qu'il ne pouvait pas le mettre sur papier, parce qu'il n'avait pas l'autorisation de faire ça, il pouvait juste me donner sa parole.

    Au final, je n'ai pas pu l'exploiter pendant 10 ans, mais j'ai tout de même pu en jouir entre 2002 et 2006. Parce que, à partir de 2007, cet arbre fut vendu à une autre entreprise, qui a racheté 70% de l'entreprise qui possédait initialement l'arbre. Et je n’ai plus été autorisé à en acheter les productions. Donc, la première année, n'ont été produites que 3 caisses de ce thé, envoyé à Chenzhen pour une vente aux enchères. Les enchères atteignirent 400 000 HKD par galette ... Tellement de merveilleuses histoires de thé dans ma vie (rires)!

    Olivier Schneider: Que pensez-vous de la question de l'assemblage du puerh? Tous les thés âgés des années 70 tel que la 88 qing (7572) ou les autres recettes de Menghai Tea Factory étaient des assemblages de feuilles. Par rapport à cela, des thés comme celui que vous avez fait produire à partir d'un arbre unique, constituent une approche diamétralement opposée?

    Pour comprendre cela il faut comprendre la théorie de la production. Toute la qualité est concentrée sur les première feuilles de printemps, comme pour la première série de 7811 (célèbre galette de Feng Qing, voir plus bas - ndlr). Donc, si vous cherchez une qualité supérieure, elle doit d'une part provenir de véritables arbres, et non d'arbustes, et d'autre part des premières récoltes de printemps. Donc quand vous stockez et vendez ce type de thé de qualité, vous donnez un message clair à vos clients: D'où ce thé provient-il? Quel âge à l'arbre? Quelle est la période de récolte? C'est là-dessus que nous sommes concentrés.

    Mais d’un autre coté il y a certaines personnes qui n'ont pas le besoin ou l'envie de faire un thé de si haute qualité. Parce que quand tu cherches à produire une telle qualité, cela va se traduire sur des prix élevés, et donc ce n'est pas facile à affirmer face à la concurrence. Donc que font-ils? Ils prennent la deuxième ou troisième récolte. Et comme les consommateurs ne sont pas assez pointus et éduqués ils ne s'en rendent pas compte. Il y en a même qui utilisent le thé de l'automne. Or si tu visites le Yunnan et que tu observes le climat, tu comprends que la meilleure période pour récolter se situe avant le début de mai, de mi-mars à la fin avril. Après, la pluie vient et elle sera de plus en plus intense jusqu'en août, avant de s'arrêter. Donc après septembre, tandis que la pluie cesse, le soleil revient, les arbres des montagne renaissent et les jeunes bourgeons ressortent parce qu'ils ont eut assez d'eau. Les bourgeons et les feuilles qui jaillissent alors sont très gros, magnifiques! C'est parfait pour faire une superbe galette à mettre devant vos yeux. Mais le goût est très fade. Parce qu'il y a trop d'eau dans le sol. Les fermier ont compris que peu de gens voudront acheter un tel thé, donc ils baissent les prix de moitié, parfois même de deux tiers pour vendre ce thé. Et les producteurs superficiels, qui ne cherchent qu'a dépasser la concurrence et qui sont plus concentrés sur la quantité que sur la qualité achètent ce thé. C'est une des raisons pour laquelle on assemble le thé.

    Mais vous devez comprendre qu'il y a une autre approche de l'assemblage qui est totalement différente. Comme cette galette qui vient de 5 montagnes à thé. On n’a collecté pour cela que des thés provenant des premières récoltes de printemps, mais provenant de 5 montagnes différentes. C'est le concept de l'assemblage qui est derrière la 88 qingg: Ils (Menghai Tea Factory) ont collecté tous les thés de différentes montagnes, puis les ont assemblés pour produire un thé de qualité. Donc, c'est une approche totalement différente. Différentes montagnes à l'automne n'auraient pas donné le même résultat, jamais cela n’aurait pu avoir un arôme tellement riche, tellement bon et un tel équilibre dans la bouche.

    Olivier Schneider: Hong Kong, comme la Chine, possède une forte culture du thé, mais la situation et l'approche sont largement différentes, en particulier en ce qui concerne le thé puerh. Comment voyez-vous le présent du puerh (Pu Er tea) depuis Hong Kong?

    Ok. Ce que tous les amateurs de thé puerh (Pu Er tea) savent, c'est qu’en 2008 le marché c'est effondré. Mais à Hong Kong nous sommes restés très stables. Nous n'avons pas été affectés par cet évènement. Pourquoi? Parce que nous avons éduqué les gens. Nous leur avons appris à apprécier du thé de qualité. En particulier pour le puerh (Pu Er tea) nous avons mis en avant le thé provenant de grand s arbres, situés dans la montagne, parce qu'ils sont plus naturels. Avec un thé qui a poussé sans engrais, vous pouvez sentir dans votre bouche des sensations intensément naturelles. Ces thés ne sont pas forts, mais procurent une forte satisfaction à travers tout votre corps. Donc quand les gens viennent pour étudier et apprendre le puerh (Pu Er tea) dans notre tea house, ils acquièrent une bonne connaissance: comment apprécier un bon thé puerh, comment le choisir. Cela nous met dans une position très sûre, nous ne sommes pas affectés (par les crises du marché) et nous continuons à vendre de la très grande qualité.
    Mais, bien sûr, nous comprenons aussi qu’aujourd'hui en Chine, le marché est gigantesque. Le mois dernier, j'ai rendu visite à quelques amis en Chine et j'ai infusé le thé que nous sommes en train de boire (un célèbre thé commandé par Vesper Chan et produit à partir de 5 montagnes du Yunnan). Ils n'étaient pas dans le business du thé, juste des gens ordinaires. Quand j'ai infusé ce thé, après 3 tasses, ils s'écriaient qu'ils n'avaient jamais bu un thé aussi merveilleux! D'où vient il? De quelle région? Et alors, chacun d’eux a acheté 30 tongs (210 galettes), immédiatement!
    Et aujourd'hui, ce thé est déjà épuisé. Une galette ou deux c'est toujours possible, mais un tong ou deux non, c'est fini.

    Olivier Schneider: Votre approche du puerh (Pu Er tea) vert est, encore aujourd'hui, très singulière pour Hong Kong. Quelque soient les tea house ou les boutiques où nous nous sommes rendus à Hong Kong, on nous a systématiquement offert de magnifiques puerh (Pu Er tea) fermentés, ou âgés. Vous semblez être le seul à autant mettre en avant le jeune puerh (Pu Er tea) vert.

    De ce que vous avez pu voir à Hong Kong, vous remarquez qu'on (The Best Tea House) est plus en avance, sur ce sujet.

    Je vais vous montrer et vous faire goûter un autre thé (un autre puerh (Pu Er tea) brut). C'est la seconde édition. La première édition était sous la forme d'une galette. Puis on s'est rendu compte que si on faisait toujours du thé sous la forme de galette ce n'était pas pratique pour les gens qui se déplacent, qui voyagent. Donc j'ai créé une nouvelle forme: 6 pièces individuelles dans un tube. Puis 12 tubes dans une boite. Et ensuite vous pouvez casser chaque pièces en deux. Si vous sortez, vous pouvez mettre un portion entière dans la théière puis servir plus de 10 personnes. Et si vous n’avez que deux ou trois amis, vous mettez juste la moitié. Je veux que les gens (de Hong Kong) qui aiment le puerh (Pu Er tea) (sombre) puissent facilement et simplement comprendre à quoi du bon puerh, frais peut ressembler.

      Olivier Schneider: Vous disiez précédemment que le crack qu'a connu le puerh (Pu Er tea) en 2007 n'a pas affecté Hong Kong. Cependant en Chine, qui a été terriblement affecté par cette crise, tout le monde avance le fait que tout cela a été orchestré depuis Hong Kong et que Hong Kong est en quelque sorte responsable de ce phénomène. Quelle est votre vision là-dessus?

      Il faut que je vous parle du marché, et que je vous explique pourquoi le puerh (Pu Er tea) est tombé aussi bas en 2008. En 2006, tout le monde avait déjà compris quelque chose: quand vous avez du puerh (Pu Er tea) dans les mains, vous pouvez toujours le vendre facilement, à vos amis, à d'autre personnes, etc, et faire facilement du profit. Cela a duré deux ans ainsi, entre 2006 et 2007. A la fin de 2007, c'était encore très actif. A cette période, quand vous visitiez un marché au thé, que ce soit à Beijing, Shanghai, Guangzhou, c'était une merveilleuse image. Partout dans les rues vous aviez des charrettes pleines de puerh, partout! Vraiment très très actif.

      Et c'était le moment juste avant que tout s'effondre (rires). A cette époque, les magasin avaient compris qu’avec du thé en main, vous serez sûr de faire du profit, surtout avec les thés provenant de Xiaguan, Menghai Tea Factory, ces grandes entreprises. Parce que les prix de ces thés montaient continuellement, chaque jour. En un an, ils pouvaient valoir trois fois le prix auquel vous les aviez achetés. Ce fut la période folle.

      Au tout début du printemps 2008, si vous vouliez acheter les thés de Xiaguan, Menghai Tea Factory, et toutes ces grandes usines, il fallait fixer la qualité du thé. Par exemple, si vous vouliez la première qualité, vous deviez payer 10 millions. La seconde qualité valait la moitié, la troisième 1 million seulement. Et vous deviez déposer l'argent d'avance sur leur compte.

      Le propriétaire du "roi des arbres à thé" dont je vous ai parlé, c'était Feng Qing Cha Chang. J'ai travaillé avec ce producteur pendant plus de 10 ans. Donc à ce moment, comme mon 88 qing était presque épuisé, je voulais trouver une nouvelle galette pour continuer. A cette époque, Feng Qing Cha Chang avait une galette nommée 7811. Cette galette gagna, à Guangzhou, le premier prix d'un concours. J'ai senti le thé, son goût et l'arrière goût était merveilleux. Donc, je voulais acheter toute la production de ce thé pour être le seul à le vendre. Il me dirent que c'était possible mais que je devais verser pour cela 2500000 RMB (). Je l'ai fait, pour avoir l'exclusivité sur toute la production de ce thé.

      Mais je fus vraiment malchanceux. Les 200 premières galettes sont arrivées à Guangzhou. Alors j'y suis allé pour réceptionner le thé. Je l'ai goûté, il était merveilleux. Puis, j'ai attendu la deuxième cargaison, 200 nouvelles galettes. Mais, quand j'ai goûté la deuxième livraison, j'ai remarqué que la qualité des feuilles était de 40% inférieure. L'arôme était 40% inférieur, le goût dans la bouche lui aussi 40% moins bon. J'ai appelé l'usine et je leur ai demandé: mais pourquoi cette livraison n'est pas comme les 200 premières galettes? C'est tellement différent, visuellement elle se ressemblent mais au niveau du goût et des arômes c'est totalement différent! Et alors il me donnèrent la réponse: La production de la première récolte de printemps était de seulement 200 galettes. Les 200 suivantes provenaient de la deuxième récolte! Et alors je me suis immédiatement écrié: alors, la troisième cargaison proviendra de la troisième récolte??

      Comment est-ce qu'ils peuvent vendre ainsi des thés de qualité aussi différentes mais avec les mêmes références et emballages? Je ne peux pas accepter cette manière de travailler. Finalement, je n'ai accepté que la première cargaison et ils m'on rendu mon argent.

      Si vous regardez, vous avez ici (en nous montrant un tampon sur l'emballage de la galette) la date de production. Pour la première série de 200 galettes, il est indiqué 25 avril. La seconde est en mai. Qui sait, peut-être la troisième aurait été août... mon dieu (rires). Donc, quand j'ai refusé la seconde cargaison après 2 mois, tout le marché s'était déjà effondré. Et c'est la vrai raison de ce qui s'est passé, tout le marché fonctionnait comme ça à ce moment.

      Olivier Schneider: Mais lorsque vous leur avez renvoyé la deuxième cargaison et refusé les suivantes, elle se sont retrouvées sur le marché? Sans que les acheteurs ne soient au courant d'une telle différence?

      Oui. Quelques clients vinrent voir mes galettes, et me demandèrent pourquoi mes galettes étaient tellement plus chères? Ils disaient: J'ai vu la même galette dans une autre boutique à Hong Kong, mais moins cher. C'est là qu'il faut donner aux clients les moyens de comprendre l'histoire, le pourquoi des choses.

      Olivier Schneider: Mais comment les prix ont pu monter aussi haut avant la chute de 2008?

      C'est fou! C'est à cause du système des commandes. Si tu investissais 1 million, avant même de vendre le thé sur le marché tu avais déjà gagné 20% ou 30%. Tu n'avais même pas besoin de vendre la marchandise au client, que tu avais déjà gagné! Et tes clients, eux aussi, payaient d'avance en cash pour réserver les commandes. Toute le monde du puerh (Pu Er tea) en Chine étant dans ce système.

      Et donc, c'est pourquoi, les thés de toutes les grandes usines se sont totalement écroulés. Nous n'avons pas été affectés, parce que nous ne vendons pas des grand noms, nous vendons la qualité. Même ce merveilleux 7811, je vais l'infuser pour vous afin de vous montrer. Il est merveilleux parce que c'est la première récolte de printemps. Donc, sur le marché, on trouve la seconde, la troisième récolte, etc ... Le client n'a pas ce savoir, cette expérience, donc il achète en fonction de la marque, mais pas de la qualité (rires).

      Vesper Chan détaillant une 7811, première récolteVesper Chan détaillant une 7811, première récolteVesper Chan détaillant une 7811, première récolteVesper Chan détaillant une 7811, première récolteVesper Chan détaillant une 7811, première récolteVesper Chan détaillant une 7811, première récolte
      • 1.Vesper Chan détaillant une 7811, première récolte

      Maintenant, vous pouvez voir sur cette galette (en nous montrant la surface d'une 7811), le thé du début de printemps doit être très fin, avec de fins bourgeons. Si tous les bourgeons sont comme celui-ci (en nous montrant un bourgeon plus gros), c'est un thé qui vient de la fin du printemps, ou de l'automne. Et la face et le dos doivent être les mêmes. Alors, vous savez que cela provient d'une série unique.

      Olivier Schneider: Mais, dans le passé on assemblait les différentes saisons ensemble n'est ce pas? Notamment pour stabiliser les productions? C'est la forte hausse de la demande après 2003 qui a incité les gros producteur à presser continuellement ce qui venait et ainsi rendu les productions de plus en plus instables?

      Oui. C'est pourquoi des consommateur avertis pensent que la meilleure qualité est celle d’avant 2003.

      Olivier Schneider: Dans le Yunnan, on commence seulement depuis peu de temps à dire que le thé provenant d'arbres (en opposition aux buissons) sont meilleurs. J'ai lu que cette pensée viendrait de Hong Kong?

      Oui, c'est exact. Je pense que la bonne qualité doit provenir de gros arbres (possédant un véritable tronc dissocié des branches). Parce que l'arôme de ces arbres est très naturel, sans engrais et sans pesticides. Aussi les plantations artificielles (tai di), où les buissons font à peine plus d'un mètre, ont des racines qui font à peine un dixième de la taille de la plante. C'est très différent chez les grands arbres. Non seulement ils sont deux ou trois fois plus grands que les tai di, mais aussi leur racines font la moitié de leur taille environ. Elles iront donc très profondément dans le sol et absorberont ainsi différents types de nutriments et minéraux fins. Et ce type de substances de la terre est très bon pour la santé et le corps.

      Olivier Schneider: Donc, ce concept est quelque chose qui vous est venu très naturellement?

      Oui. C'est aussi parce que je possédais le droit sur cet arbre millénaire entre 2002 et 2006. Chaque année, il ne produirait pas plus de 45 galettes. Entre 40 et 45 galettes. Une production très limitée. Bien sûr, j’ai demandé pourquoi ils ne pouvaient pas produire plus de thé pour moi? Et alors ils me donnairent une très belle explication, mais très vraie: L'arbre était trop vieux, donc les bourgeons ne viennent qu'une fois par an, au début du printemps. Et ensuite l'arbre n'a plus assez d'énergie pour produire de nouvelles jeunes feuilles.

      A Lincang, nous avons aussi découvert un goût merveilleux, celui d’un arbre vieux de 300 ans à l'arôme magnifique, je vous le ferai goûter après. Une telle qualité est très rare, ce n'est que la seconde fois en 20 ans d’expérience que je découvre un thé puerh (Pu Er tea) de cette qualité. Le goût n'est pas aussi riche dans la bouche que du tai di, parce que c’est un grand arbre, mais ce thé provoque un autre feeling, qui est bien plus élégant (rires).

      Vesper Chan qui à l'issu de cet entretient se voit offrir une peinture par une de ses élève qui l'a suivit depuis près de 20 ansVesper Chan qui à l'issu de cet entretient se voit offrir une peinture par une de ses élève qui l'a suivit depuis près de 20 ansVesper Chan qui à l'issu de cet entretient se voit offrir une peinture par une de ses élève qui l'a suivit depuis près de 20 ansVesper Chan qui à l'issu de cet entretient se voit offrir une peinture par une de ses élève qui l'a suivit depuis près de 20 ans
      • 1.Vesper Chan qui à l'issu de cet entretient se voit offrir une peinture par une de ses élève qui l'a suivit depuis près de 20 ans

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